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Romans de Lise Marcy
27 juin 2019

Spin off Les lois de l'amour Aurore

Chapitre 1

Paul dort. Il a eu une rude journée hier. Il a fini tard. Désormais il siège à la cour d’assises. Il voulait du changement mais certains meurtres lui sont très difficiles à digérer. Il lui arrive de prendre certaines affaires trop à cœur.

J’essaie de l’aider du mieux que je peux à s’endurcir afin de ne pas trop se laisser attendrir par ces dernières. Il y est depuis à peine quelques semaines et ce n’est pas encore évident.

En ce qui me concerne, j’ai appris à le faire par la force des choses. Cela fait plus de dix ans que je juge des affaires concernant le droit des enfants. Certains parents se déchirent et oublient que ceux qui en souffrent le plus restent leurs jeunes enfants. Certains jeunes n’ont plus de parents… Bref nous sommes en vacances depuis ce matin et il est hors de question que l’on parle du boulot. Ce soir nous recevons Ashley, Xav et les enfants et j’ai hâte d’y être. Nous ne nous voyons pas aussi souvent que l’on aimerait. Nous avons tous nos vies et elles sont bien remplies.

— Mon amour, à quoi penses-tu de si bon matin ? Tu me sembles préoccupée.

— Je réfléchis à mon menu de ce soir. Je suis si excitée à l’idée de voir Ashley.

— Les voir heureux après tout ce qu’ils ont vécu c’est un peu bonheur.

— Je ne te le fais pas dire. 

Mon mari m’enlace et je ressens tout son amour. Il est tellement doux et attentionné. Plus j’y repense et plus je me dis que je suis comblée que les choses ne soient pas passées comme je l’imaginais plus jeune. Vous me connaissez à travers les yeux de mes amis. Laissez-moi vous raconter mon histoire.

 

Mes parents se sont mariés jeunes parce que cela ne se faisait pas de se fréquenter en dehors du mariage. Ils l’ont donc toujours vécu comme une contrainte.

Ils ne voulaient pas d’enfants. Je suis arrivée comme un cheveu sur la soupe.

 

Je me rappelle que depuis mes quatre ans, ils n’ont cessé de de me répéter que je n’avais pas été désirée, du moins mon père. Ma maman quant à elle ne disait rien.

Au début, j’en ai souffert. Avec le temps, je m’y suis habituée et l’ai accepté.

 

Un soir, papa, qui était en colère car je refusais d’apprendre ma leçon, m’a dit :

— Tu me rappelles constamment pourquoi je ne voulais pas d’enfants. Tu es vraiment épuisante. Heureusement que j’ai convaincu ta mère de se faire retirer son utérus. Au moins, nous sommes sûrs qu’il n’y aura plus jamais d’accidents aussi malencontreux que toi !

J’avais huit ans et cette remarque m’a blessée même si je ne comprenais pas vraiment son sens à cette époque-là.

Je n’ai jamais oublié cette phrase.

J’ai couru dans ma chambre. J’ai pleuré. J’étais forte malgré mon cœur brisé.

Maman est venue me voir.

— Je t’aime ma chérie. Ton papa est spécial.

— Retirer u utérus c’est quoi ?

Ma maman m’expliquait toutes les choses que je ne comprenais. Elle ne contredisait pas papa mais elle n’était pas comme lui.

Elle a rougi. Je la sentais mal à l’aise.

— Tu sais que je ferai tout pour comprendre maman. S’il le faut je demanderai à madame Solin. Il s’agit de ma maîtresse de l’époque.

Elle a respiré et m’a déclaré de manière claire :

— Toutes les femmes ont un utérus et il nous permet de devenir maman.

— Même si tu ne veux plus d’enfants, tu n’aurais pas dû le retirer. Maintenant, tu n’es plus une femme maman.

Elle m’a regardée.

— En quelque sorte ma chérie. J’aime ton père, je ferai tout pour lui.

J’ai compris à ce moment-là que ni maman, ni moi n’étions aimées de mon père. Mais aussi que maman était bien trop dévouée à cet homme nocif pour elle. Comment pouvait-on faire une telle chose pour une personne ? Aimer un homme qui ne nous aime pas en retour ? Je trouvais cela inconcevable. Je n’aimerais jamais un homme. 

 

 

 

Chapitre 2

À dix ans, j’ai surpris une conversation qui m’a choquée au plus haut point et qui m’a confortée dans ma conception de l’amour.

— Chéri, ce soir je ne veux pas y aller.

Où ne veut-elle pas aller ? Ils ne sont jamais à la maison le week-end. Où vont-ils ? Je savais que je ne devais pas écouter mais je veux savoir pourquoi ils m’abandonnent depuis si longtemps ? J’en étais là dans mes réflexions quand j’ai eu une réponse qui m’a vraiment mis mal à l’aise.

— Non, tu ne me fais pas faux bon. La semaine dernière déjà tu étais crevée. Alix et Pat sont impatients de s’occuper de nous et je le suis tout autant.

— J’ai besoin d’une pause.

— Pas ce soir !

Le ton de mon père était sec. Mes parents sont, d’après ce que je comprends, des échangistes. Encore une fois ma vision de l’amour s’est détériorée. Le sexe semblait être important dans leur vie mais pas l’amour.

— Quand tu m’as rencontré, tu connaissais mes penchants. Je t’en ai toujours parlé. Je t’ai épousé parce que tu semblais ouverte. Ne l’oublie pas ! J’ai besoin de coucher avec plusieurs partenaires. C’est ma seule conception de l’amour. Je n’en ai pas d’autres et je ne le désire d’ailleurs pas ! Si je ne me sens pas soutenu, je m’en irai.

— Et notre fille ?

— Elle t’aura toi…

— Comment…

— Tu sais quoi faire pour que notre vie soit heureuse !

Il s’est approché d’elle, lui a donné un baiser et a quitté la pièce. Maman est restée là à pleurer. Elle m’aimait autant qu’elle l’aimait. Elle s’est sacrifiée par amour pour lui et pour moi. Quelle triste vie.

Je l’ai rejoint.

— Maman, je t’aime. Merci.

Elle m’a regardée dans les yeux et m’a prise dans ses bras.

— Tu sais ton père nous aime à sa façon.

Je n’ai rien répondu mais je ne croyais pas du tout ce qu’elle venait de m’annoncer. Nous sommes restées ainsi toutes les deux. C’est la seule et unique fois que j’ai prononcé ces mots à ma mère. Je ne pouvais qu’aimer cette femme et ce sera la personne que j’aimerais j’en étais certaine.

 

J’ai un esprit fin et je comprenais très vite. J’ai appris à lire à quatre ans et je m’ennuyais à l’école. J’ai donc suivi un parcours particulier. J’ai été peu de temps après diagnostiqué enfant précoce.

Ces deux psychiatres que sont mes parents ont toujours refusé que j’avance trop vite dans ma scolarité, sous peine de me perturber. Je me suis donc toujours ennuyé. Je ne me suis jamais plaint car une petite fille gentille ne le doit pas. Si je faisais une bêtise, papa me disait combien j’étais une erreur dans leur vie et combien j’étais imparfaite malgré mon intelligence soi-disant incroyable.

Ce diagnostic me faisait peur. Je ne comprenais pas forcément à quoi cela correspondait. Quand j’avais des questions, je pouvais toujours les poser à maman. Elle m’expliquait toujours.

— Maman, ça veut dire quoi que je suis précoce ?

— Tout simplement que ton cerveau est rapide à tout analyser. Que tu comprends très rapidement.

 

Il m’a manipulée, retourné le cerveau jusqu’à mes treize ans. Il faisait de moi ce qu’il voulait.

L’adolescence est une période difficile. La mienne n’a pas été des plus simples.

Cette année, je me suis rebellée et j’ai vécu un véritable enfer…

 

 

Chapitre 3

Mon père n’a jamais aimé les garçons, hommes qui ont fait partie de ma vie. Avec mes parents croire en l’amour n’avait pas de sens.

Ainsi à 14 ans, mon voisin Patrick et moi étions tout le temps l’un chez l’autre. Ses parents comme les miens n’étaient jamais présents. Nous les soupçonnions même d’avoir une liaison ensemble. Nous imaginions ce qu’ils pouvaient faire ensemble tous les quatre. Tant est si bien qu’un jour, nous avons décidé de coucher ensemble. Ni lui, ni moi n’étions amoureux et ne pouvait d’ailleurs le concevoir. L’amour n’existe pas mais le sexe peut ne pas être mauvais. Ce soir-là après avoir dévoré notre pizza, Pat m’a proposé :

— Et si nous faisions l’amour ensemble ?

— Tu plaisantes ?

— Non, je suis sérieux. On s’entend super bien. Je t’aime bien, toi aussi tu m’aimes bien alors pourquoi ne pas découvrir ensemble en quoi ça consiste ?

Je l’ai regardé un moment. Il était vraiment sérieux. Mon cœur s’est mis à battre la chamade. Suis-je vraiment prête ?

Pourquoi pas après tout ? Je n’attends pas un prince charmant. A quoi bon attendre ?

Il a allumé son ordinateur et a mis un film de cul. Je vous passerais les détails car j’ai trouvé la posture de la femme très avilissante. Apparemment, il aimait regarder ce genre de films et se masturber devant. Il ne s’est pas gêné pour le faire devant moi.

— Tu veux me le faire ?

Il ne manque pas d’air. Mais j’avoue que l’expérience me tentait grandement.

Il m’a posée la main sur son sexe et je l’ai caressé du mieux que j’ai pu. Il m’a ensuite préparée à son tour. Lorsqu’il m’a pénétré j’ai expulsé un aïe bien douloureux. L’expérience finalement de cette première fois n’a été ni bonne ni mauvaise. Il m’a fallu bien quinze jours avant de recommencer. A partir de la quatrième fois, j’ai commencé à prendre du plaisir.

Plusieurs mois plus tard, comme à leur habitude, mes parents étaient partis et m’avaient laissé seule. Pat m’avait rejoint en fin de journée pour une soirée galipette comme nous avions tendance à l’appeler. Mes parents étaient revenus plus tôt que prévu. Ils nous avaient surpris en plein ébats. J’ai encore en tête la honte que j’ai ressentie à ce moment précis. Mon père était furieux. Il avait congédié Pat et lui avait interdit de remettre les pieds à la maison.

— Tu te rends compte que tu as 14 ans, hurla ma mère.

— Et alors ? Avec des parents détraqués comme vous, vous vous attendiez à quoi ?

— Pardon ?

Ma mère était choquée par mes propos. Mon père m’a giflée.

— Je t’interdis de poser la main sur moi encore une fois. Si tu recommences je te dénoncerais auprès des gendarmes, tu m’entends ? J’ai des droits.

— Tant que tu vivras sous mon toit, tu suivras mes règles !

— Tes règles ? Laissez votre gamine de 14 ans seule pour aller baiser avec d’autres couples, vous trouvez ça normal ? Vous ne pouvez vous en prendre qu’à vous-même. Je ne compte pas arrêter ma relation avec Pat. Vous avez récolté ce que vous avez semé. J’aime le sexe, je ne compte pas m’arrêter en si bon chemin.

Je n’arrivais pas à croire que j’avais eu cette audace. Mon père était furieux. Je sentais sa rage dans sa respiration saccadée. Je crois l’avoir effrayé. C’est sans doute la raison pour laquelle, il ne m’a pas giflé une seconde fois pour mon insolence.

— Maintenant le week-end, nous ne partirons plus. Tu ne verras plus Patrick. Dès ta sortie de l’école, tu rentreras directement à la maison.

Il a en effet, mis à exécution ses propos. Je l’ai détesté. Défié mon père m’avait excité. Je ne comptais pas céder éternellement à ses attentes. Je n’ai plus couché avec Pat chez lui ou chez moi. Nous le faisions à l’école. Entre deux cours ou pendant la récréation.

L’année suivante, Pat et ses parents ont déménagé. Je suis encore persuadée que mon père n’y est pas pour rien dans ce départ précipité. Je n’ai plus jamais eu de ses nouvelles. Dans la mesure où notre entente était purement sexuelle, le seul manque que j’ai eu était à ce niveau. Il m’a fallu trouver un autre mec pour satisfaire mes besoins. Je suis donc sortie avec un terminale à 15 ans. J’étais en seconde. C’était un bon coup. Mon père qui m’avait lâché un peu la bride m’a vue avec lui un après-midi et a vite compris que Jérémy et moi ne nous fréquentions pas comme de simples potes.  Il a voulu que je leur présente. Je n’ai pas vraiment eu le choix. Il l’a donc menacé et il m’a quittée. Il a renouvelé son scénario d’intimidation sur chacun de mes petits amis. Je ne lui présentais plus mais il réussissait toujours à nous voir ensemble et à les contraindre. J’ai donc détesté cet enfoiré pendant la majeure partie de mon adolescence. Les prises de tête entre lui et moi étaient féroces mais aucun des deux ne lâchait.  

 

Lorsque j’ai eu mon bac et que j’ai réussi à les convaincre par je ne sais quel miracle en fait si je sais comment. J’étais allée à bonne école et avait compris l’art de la manipulation de mon père. J’ai donc agi sur le maillon faible de la famille, ma mère et grâce à elle j’ai pu quitter ma province pour Paris. Dauphine, une super fac me recrutait comment pouvaient-ils refuser ?

Arrivée à Paris, libre, je me suis enfin libérée et j’en ai profité. Je suis partie à la mi-août et je n’arrêtais pas de sortir, je buvais tous les soirs et couchais avec un mec différent. Bien évidemment, je me protégeais, il était hors de question que je fasse un gosse. Le jour de la rentrée, j’ai rencontré une étudiante qui semblait méga coincée. Elle était hautaine et se croyait meilleure que les autres. On se détestait. Je n’avais pas besoin de bosser pour avoir d’excellents résultats. Je sais qu’elle passait ses journées à la BU pour travailler alors que moi non. Pourtant mes résultats étaient toujours supérieurs aux siens. Je profitais de la vie. Un jour, elle m’a fait une réflexion et moi qui ne me laissait atteindre par personne, j’ai été touchée. Sa remarque m’a touchée et une larme a coulé de ma joue. Elle s’est excusée. Je ne remercierai jamais assez ma larme d’avoir coulé car cette fille que je n’aimais pas est devenue ma meilleure amie. Vous avez deviné qu’il s’agissait d’Ashley. A partir de ce jour, nous avons appris à nous connaître. J’ai calmé mes sorties, j’ai appris à plus me respecter et à respecter mon corps. Pour autant, je ne suis pas devenue aussi pure qu’elle. Cela m’était inconcevable. Mais je choisissais, les mecs avec qui je couchais avec plus de soin.  Quand j’ai rencontré ses parents, j’ai compris que l’amour existait. Qu’il pouvait être pur et beau. Nos parents étaient si différents. Notre enfance aussi. Quand elle a rencontré Xavier Lafont, j’ai compris que cet homme était celui qu’il lui fallait et qu’ils étaient faits l’un pour l’autre. Le regard qu’ils ont échangé, et ce que j’ai lu dans leurs yeux à tous les deux étaient juste d’une pureté. Je n’ai plus vraiment eu la même vision de l’amour après ça. Une relation entre eux était impossible, il est vrai mais je ne doutais pas qu’un jour ils se retrouveraient.

— Tu sais très bien qu’il ne se passera jamais rien entre cet homme et moi.

— Je n’ai pas cette vision. Il y a eu une vraie osmose entre vous. Je ne sais pas quand, mais je sais que vous deux vous vivrez quelque chose ensemble.

 

Quand on a appris que sa femme était décédée, j’en ai d’autant plus été certaine.

— C’est un signe.

— Tu parles bien de la mort d’une femme ?

— Quoi ? On ne la connaissait pas. Et elle avait l’air antipathique. Je ne peux pas avoir de la peine pour quelqu’un que je ne connais pas. Désolée, tu m’en demandes trop.

— Au moins compatir au fait qu’il vient de perdre sa femme.

— Justement grâce à toi, il l’oubliera.

— Je t’adore, mais tu es barjot !

— Non. Je suis romantique.

— Tu m’excuseras, mais je trouve ça plutôt glauque que romantique.

 

Avec le temps, je l’ai incité à postuler à son cabinet.

— C’est un signe. Tu ne peux pas passer à côté. Si tu es embauchée avec la quantité de postulants, tu sauras que c’était le destin.

— Je vais postuler même si je ne crois pas en ton fameux destin justement.

J’avais eu raison. Elle avait eu le poste et elle vit une histoire d’amour magnifique avec un type extra.

En ce qui concerne ma relation avec Paul. Le jour de notre rencontre, j’ai vraiment flashé sur lui. On nous a proposé de participer à des procès et naturellement plusieurs d’entre nous ont accepté. Nous devions prendre des notes et faire des synthèses des affaires ainsi que du jugement. Je ne m’attendais pas à tomber sur l’homme de ma vie.

Lorsque je suis arrivée, je me suis assise sur un des sièges du fond. Nous étions plusieurs étudiants. Nous étions le plus discret possible. Le juge Paul Thavers a été annoncé et il est arrivé dans la salle d’audience. Il était à couper le souffle. Il m’a naturellement tapé dans l’œil. Il n’y avait aucune chance qu’il ne me remarque. Je ne suis absolument rien. Ce beau blond aux yeux verts me faisait vraiment de l’effet. Il ne m’a même pas jeté un regard. J’y suis allée plusieurs fois avant qu’il ne pose les yeux sur moi. Je n’ai plus été intéressée par un autre homme dès le jour que je l’ai rencontré. Ils ne me faisaient plus aucun effet et je n’avais pas non plus envie de coucher avec qui que ce soit. Je rêvais de lui, de son corps contre le mien.

À plusieurs reprises, j’ai croisé le malheureux Xavier CHOLAT, cependant Ashley n’a jamais voulu m’accompagner. Elle refusait de rater les cours. Pff. Heureusement qu’il a fini par la dérider.

Un mardi, j’ai pris mon courage à deux mains et je suis allée lui proposer une interview. J’ai donc improvisé un gros bobard pour avoir son téléphone.

— Bonjour Juge Thavers. Je m’appelle Aurore Romani.

Il m’a serrée la main et fait un énorme sourire charmeur. J’étais déjà charmée, il a fini de me prendre dans ses filets.

— Je suis étudiante à Dauphine et je voudrai vous interviewer pour le journal de ma fac.

— Avec plaisir.

— Accepteriez-vous de me donner votre numéro. Je vous appellerai afin de convenir d’un jour ensemble pour faire l’interview ? Qu’en pensez-vous ?

— C’est une excellente idée.

Il me donne son téléphone et me demande de faire sonner le sien afin d’avoir le mien.

— Vous comprenez, je ne réponds pas aux numéros que je ne connais pas.

— J’imagine, en effet.

 

Peu de temps plus tard, il m’a appelée et proposé de boire un verre bien avant que je le contacte pour l’interview. Je lui ai avoué le soir de notre premier rendez-vous que j’avais manigancé cela pour avoir son numéro. Nous nous sommes rapidement tutoyés.

— J’en suis ravi. Je t’ai repéré depuis le premier jour de votre venue. Je cherchais un moyen de t’approcher. Tu m’as devancé.

Nous avons souri.

— Tu attends quoi de cette soirée ? m’a-t-il demandé de manière directe.

— Et toi ?

— J’ai envie de toi.

— Sans doute pas autant que moi, Paul.

Nous sommes rentrés chez moi. Quelle ne fut pas ma surprise de lire qu’Ashley était allée chez son patron, Xavier. J’espérais qu’elle couche avec lui. Mais je savais qu’il lui faudrait plus de temps pour réussir cet exploit.

Paul a trouvé notre appart bien sympa. A peine après m’avoir dit cela, il s’est jeté sur moi et nous avons fait l’amour pendant des heures durant sans répit. Je n’avais jamais vécu cela. Je n’avais jamais eu un tel amant. On sentait l’homme expérimenté. Notre relation ne s’est jamais amenuisée. Tout est si parfait avec lui.

 

Lorsque nous sommes arrivés chez mes parents, mon père a vu notre relation d’un mauvais œil. Il n’a pas eu à ouvrir la bouche que dans ses yeux j’ai vu qu’il ne l’appréciait pas. 

— Papa, maman, je vous présente Paul Thavers.

Je ne m’attendais pas à ce qui a suivi.

— Comme je sais que ça ne marchera pas, je ne vais pas faire semblant de lui faire croire que je l’aime, se permit mon père.

— Pardon ?

Ses paroles étaient choquantes.

Ma maman lui a donné un gros coup de coude.

— Quoi, c’est ton combientième amant ? Le soixantième, le centième même. Depuis le temps que tu es à Paris…

— Papa, je t’en prie.

— Tu ne lui as pas dit que tu couches avec des mecs depuis tes quatorze ans ?

Paul voit comme je suis gênée et honteuse.

La journée chez eux a été très pénible pour nous.

Le chemin de retour s’est fait dans le calme.

J’ai fini par lui demander, après deux heures dans une atmosphère froide.

— Je te dégoutte ?

— Non !

— Tu mens !

—  Je n’ai pas de dégoût pour toi. J’aurai simplement préféré l’apprendre de ta part.

— Te dire quoi ? Que j’ai couché pour la première fois à 14 ans ou que j’ai baisé avec énormément de mecs.

— Les deux.

— Tu crois que c’est un passé dont je suis fière ?

— J’espère bien !

— Arrête la voiture.

— Pourquoi ?

— Je t’ai dit d’arrêter ta putain de voiture !

Il s’est arrêté et j’en ai profité pour sortir.

— Maintenant casse-toi ! La pute que je suis trouveras bien un mec pour la ramener chez elle. Peut-être aussi qu’il me baisera.

Il est sorti de la voiture.

— Je ne partirai pas sans toi, me hurle-t-il.

— Pourquoi ? Je te répugne alors je pense que nous n’avons rien à faire ensemble. J’ai eu un passé chaotique. Je ne l’ai raconté à personne. Même Ashley, ne sait pas tout. Comment peut-on le dire hein ? Mon père n’a fait que ça. Chaque fois qu’il savait que je sortais avec un mec, il le faisait fuir. Mon adolescence était pourrie. J’ai fait des conneries. Beaucoup, cependant depuis que je connais Ashley, je me suis assagie et depuis que je te connais, je ne veux plus aucun autre homme. Je ne le conçois pas. Je ne le veux plus. Je t’aime Paul. Si mon passé t’atteint c’est que l’on n’est pas fait l’un pour l’autre.

Il réfléchit alors que ses yeux sont rivés, noyés dans les miens.

— Je suis choqué, je ne peux le nier. Cependant, je t’aime plus que tout et rien ne changera mes sentiments à ton égard, tu m’entends ?

Sa voix était devenue douce. Il s’est approché et m’a pris dans ses bras. Je me suis mise à pleurer. Il m’a embrassée et nous sommes restés là un moment.

Les deux fois suivantes, mon père a à nouveau eu cette attitude mais à la quatrième, Paul a pris confiance et s’était permis de le remettre à sa place.

— Monsieur, je ne connaissais pas Aurore à cette époque. Elle était jeune, elle a fait des bêtises, vous avez je le pense, vous aussi votre responsabilité dans la vie débridée de votre fille à une période de sa vie. Je suis heureux avec elle. Je l’ai connue à la bonne époque et peu importe ce que vous me direz, je la connais assez pour savoir que je l’aime et que j’ai envie de faire ma vie avec elle. Alors cessez votre petit jeu ! Vous devriez avoir honte ! Votre fille malgré ses erreurs de jeunesse ne mérite-t-elle pas d’être heureuse ? Si je vous entends encore une seule fois faire une remarque sur sa vie d’avant, nous partirons et je crois que nous ne reviendrons jamais plus chez vous. Vu la façon dont vous la traiter, je pense qu’elle ne s’en portera pas plus mal.

Mon père était un être odieux. Pour la première fois sans doute, il était tombé sur un homme qui ne se laissait pas intimider. Il était à la fois choqué et ravie du caractère de Paul. J’ai senti dans son rictus qu’il l’admirait pour son courage. Peut-être aussi le fait d’avoir entendu que Paul m’aimait l’avait calmé.

J’ai appris un peu plus tard, qu’il trouvait que Paul était trop beau pour être sincère. Son speech lui avait fait prendre conscience que c’était l’homme de ma vie et qu’il avait été con. Il ne s’est plus jamais permis de faire de remarque me concernant. Il a même appris à connaître Paul et l’entente entre les deux hommes est devenue cordiale.

Ce qui est drôle en y repensant, c’est que mon père joue avec mes enfants. Il en est gaga. Je n’ai jamais eu cette relation avec lui.

J’en ai même été jalouse pendant un temps. Paul m’a rassurée.

— Au lieu d’être jalouse, tu devrais en être ravie, ma chérie.

— C’est quand même dur à encaisser, je dois te l’avouer.

— Tu aurais préféré qu’il soit indifférent ? Qu’il les déteste et le leur dise ouvertement.

Bien sûr que non, Paul avait raison.

— Non. En effet, c’est mieux ainsi.

Il m’a fait un énorme sourire et un gros câlin.

 

J’en ai quand même fait part à mon père un jour.

— Papa, je suis contente qu’au moins tu aimes Sarah et Corentin.

Il m’a regardée, étonné. Puis, il a compris.

— J’ai été le pire père que l’on pouvait souhaiter. J’ai tout gâché avec toi. Je n’ai jamais su comment te montrer que je tenais à toi.

Là, c’est moi qui aie été choquée par ses révélations.

— Tu es ma fille, je suis un gros con, mais je t’aime. Et comme je n’ai pas su te le montrer, je me suis dit que je ne devais pas faire la même erreur avec mes petits-enfants. Tu as un super mari, pas grâce à moi. Je devais faire mon mea culpa pour tout ce que je t’ai fait vivre. Ça ne rattrapera jamais tout, mais je me dis que tu apprécies de me voir proche d’eux.

— Oui. Merci papa.

Il m’a pris dans ses bras et j’ai senti une larme couler de sa joue sur mes cheveux.

— J’espère qu’un jour tu me pardonneras ma chérie.

— Je t’ai déjà pardonné.

Nous n’avons plus reparlé de nos sentiments et de mon enfance pourrie. On profitait du plaisir que nous tirions à être ensemble tout simplement.

Je n’ai jamais pu tout raconter à Ashley. J’ai mon jardin secret que je partage malgré moi avec mon mari. Heureusement qu’il a été compréhensif. J’ai encore honte de ma vie d’avant. Si Paul n’a pas fui, c’est que j’ai changé et que je mérite comme tout le monde une seconde chance.

Vous me connaissez mieux. J’espère que vous aussi n’avez pas une vision de moi trop négative. J’ai évolué et grandi.

Ce n’est pas que je m’ennuie, mais je reçois Ashley et sa famille, alors je vais me mettre aux fourneaux.  Merci de m’avoir lu.

 

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